Jeu de mains

 

Fidèle à son habituelle manipulation scénographique, Christophe Grimpard tourne cette fois autour de mains, héroïnes improbables, interagissant sur un décor et des acteurs évocateurs du crépuscule dans la forêt, d’univers sauvages ou imaginés, dans des gestuelles précises mais mystérieuses. Projeté sans filtre, plongé dans un jeu de marionnettiste, il fait résonner les murs du tableau d’embruns et d’odeurs d’écorces résineuses et froides, comme si des corbeaux pouvaient venir planer doucement dans un très vieil appartement. On peut parfois y percevoir l’attentive et curieuse approche d’un cerf qui pourtant s’évanouira brusquement, laissant un sentiment de désarroi déçu et de magie effleurée, la délicatesse du contact avec un jouet dont on a perdu la notion de taille, le sentiment d’être observé, si petit dans un conte classique oublié, pénétré de l’intemporelle peur du loup. Avec cette liberté d’illusionniste, à nous placer en plein air, sur scène, en pleine mer, ou confiné dans les craquements d’un parquet ancien, on s’égare dans le pur jeu formel, pour frôler au détour des touches la pureté insaisissable de ce qui ne se laisse pas apprivoiser.

 

Alice Marchesseau 2013